17/11/2022 => Jour 77
Une journée qui commence bien : l’eau est revenue ! Je re-remplis Coquillette, et on va prendre une douche dans les sanitaires. Ça fonctionne quand même mieux avec de l’eau. Une douche le soir plus une le matin, c’est plutôt rare ! Pendant qu’on range nos affaires, le vent se lève, les rafales sont impressionnantes, on a l’impression d’être poussés vers la sortie. La route n’est pas simple, Coquillette n’est pas vraiment aérodynamique.
Cerro Sombrero Rio Grande
4h
213 kms
On arrive à la frontière, c’est assez facile de sortir du Chili, quelques kilomètres plus loin, on passe la douane argentine. L’administratif est facile, mais on voit qu’ils fouillent minutieusement les voitures devant nous. Maman Blondinette stresse, elle a préparé notre repas pour le midi, elle n’a pas envie que ça passe à la poubelle. Mais notre capital sympathie est là, dès que la douanière ouvre le camping-car et voit les filles, elle n’essaie même pas d’ouvrir un placard, elle nous dit bon voyage et nous laisse passer.
Il est l’heure de manger, on ne veut pas attendre la prochaine ville à des dizaines de kilomètres, on s’arrête donc un peu en catastrophe. Je vois un grand rond-point dont un bord est face à la plage, dans un endroit sans trafic. Ni une, ni deux, je me gare, légèrement en dévers. Je me dis que les Argentins font pire. Quelques minutes plus tard, ils viennent confirmer ma théorie : une voiture prend le rond point à l’envers et se gare près de moi pour prendre des photos.
On commence à manger, mais le vent nous chahute. Avec les suspensions souples, on commence rapidement à tanguer. Maman Blondinette commence à avoir vraiment peur, et ça se communique aux filles. Je décide donc de rouler vers une station service désaffectée, mais bien orientée. Collés contre son mur, on termine le repas plus sereinement.
Ensuite on repart vers Rio Grande. Les décors sont impressionnants, on longe l’océan, qui essaie tant bien que mal d’envoyer ses vagues sur la plage. Le vent les repousse vers le large, cela fait des nuages d’écumes un peu irréels ! L’objectif en ville est de remplir notre bonbonne de gaz, après l’échec de Rio Gallegos. Mais le garde à l’entrée du magasin nous remballe, cela ferme à 14h et il est 15h. Cela me fait râler, être le matin en ville nous oblige à dormir pas trop loin, ce qui n’est pas dans nos habitudes. Maman Blondinette me calme, on a encore du gaz dans notre bouteille française et il y a moyen de recharger à Ushuaïa.
Avant qu’on redémarre, une voiture s’arrête, et nous demande si tout va bien, si avec ce vent, nous avons un problème. On explique que nous voulions du gaz, on le sent prêt à nous échanger une bouteille, mais il n’a pas le même format que la notre. Cette gentillesse nous redonne le sourire.
Nous allons faire nos courses à Carrefour, il y a un Western Union pour faire un retrait dans la galerie marchande. Nous avons lu que dans nos prochaines étapes, les retraits seront plus compliqués, donc on anticipe. Dans le magasin, Anouck discute avec un employé qui pèse les fruits et légumes, il lui dit qu’il ne faut pas rester ici, que la ville est trop ventée, qu’on sera mieux au sud, à Tolhuin. C’est là qu’on compte dormir, chouette !
Sur le parking, un homme nous accoste, il nous explique qu’il rentre d’Europe où il avait loué un camping-car, il a fait France-Espagne-Italie-Belgique, il vient de rentrer. Il nous donne plein de conseils pour notre voyage, on est impressionnés par ces rencontres bienveillantes. On repart, à la station-service on se fait photographier par un argentin, ça arrive régulièrement, même si ça se reflète peu sur les réseaux sociaux.
Rio Grande Tolhuin
1h30
110 kms
À la sortie de la ville, il y a un contrôle de police. L’officier de faction s’approche, me serre la main, se présente, plein de courtoisie. Je lui raconte notre voyage, il trouve qu’on est bien loin de chez nous, en effet ! Il nous laisse repartir en nous souhaitant bon voyage, sans même vérifier un papier.
La route devient ensuite très intéressante, nous voyons apparaître des collines, avec des arbres ! Les seuls troncs (non pétrifiés) que nous avons vu depuis le nord de l’Argentine, étaient autour des estancias, pas de forêts naturelles sur près de 6000 kilomètres ! Et finalement, des montagnes aux sommets enneigés. Cela fait deux jours qu’Anouck les guettait !
On décide d’aller au camping de Tolhuin, il est particulier. Les propriétaires ont tout bâti en matériaux de récupération, les sanitaires, des tipis pour protéger les tentes du vent, des décorations. Il y a même un grand parc /plaine de jeux, avec des constructions en palette, des passerelles, des toboggans, les filles y passent beaucoup de temps même si elles ont un peu peur sur les passerelles.
L’accueil est chaleureux, le gérant nous indique un emplacement face au lac Fagnano. Maman Blondinette va parler avec la famille qui tient le camping, ils ont hébergé 2 familles de voyageurs durant le confinement, des français et des néerlandais. Ils donnent aux filles des reliquats de la famille française, cahiers d’école et autocollants.
On espère avoir un coucher de soleil sur le lac, mais il y a quelques nuages qui bouchent la vue, c’est pas grave, c’est quand même très joli.
18/11/2022 => Jour 78
La météo annonce énormément de vent pour ce soir, on décide de partir vers Ushuaïa, on verra si la météo est meilleure au retour. Le gérant nous avait prévenu, le lac, tout en longueur, est dans un couloir qui arrive du Pacifique, d’où ces courants d’air désagréables.
On se promène d’abord sur le bord du lac, il y a des castors dans la région, on espère en voir. On est entre le lac et une lagune, mais un pont a cédé pour terminer la balade, on doit faire demi-tour. Nous quittons le camping en longeant d’autres lagunes, toujours pas de castors ! On mange à quelques kilomètres de là, avec vue sur le lac.
Tolhuin Ushuaïa
1h30
102 kms
Ensuite on roule jusqu’à Ushuaïa, Anouck avait vu qu’on avait un col à passer, on se dit qu’avec Coquillette, ça peut prendre du temps. En réalité, le col n’est pas élevé, ça passe tranquille ! Les paysages rappellent vaguement la maison, ou l’île sud de Nouvelle-Zélande : des sommets enneigés, des vallées boisées, des cascades, on en prend plein la vue, d’ailleurs je freine régulièrement pour qu’Anouck puisse immortaliser tout cela avec son bon appareil.
On arrive enfin au bout du monde, et je peux remplir mes deux bouteilles de gaz, ils ont l’adaptateur français ! Je suis rassuré. On va ensuite au camping municipal. C’est un espace à disposition, sans accueil ni sanitaire. Il y a bien sûr quelques barbecues en dur, c’est l’Argentine, et une plaine de jeux. On manque l’entrée au premier passage, c’est très mal indiqué et le chemin pentu semble impraticable. On le tente quand même, en croisant les doigts qu’il ne pleuve pas trop pendant la nuit, sinon on ne pourra pas sortir !
Il est encore tôt, je peux avancer sur les récits du blog, et les filles jouent aux legos. Maman Blondinette nous cuisine des chipas pour accompagner la soupe, et profite du four chaud pour confectionner un gâteau au chocolat. Des Argentins viennent faire des asados près de nous, avec musique et alcool en renfort, mais à 21h ça se calme, la nuit sera tranquille.
19/11/2022 => Jour 79
On sort de notre « trou » sans problème, Coquillette est vraiment passe-partout. Un détour par la boulangerie et la pompe à essence (pour faire le plein… d’eau !), et ensuite nous nous dirigeons vers le parc national Tierra del Fuego.
Ushuaïa Parque Nacional Tierra del Fuego
45 minutes
11 kms
Il y a beaucoup de circulation, même des bouchons ce samedi matin. On comprend plus loin : il y a un trail en cours, on voit des coureurs partout, et la gendarmerie bloque les carrefours pour les laisser passer. On finit par accéder au parc. La route n’est plus bitumée, mais ça reste nettement meilleur que beaucoup de routes que nous avons empruntées.
À l’entrée du parc, nous ne comprenons pas très bien les indications de l’employée à la caisse, il y a un prix pour un ou deux jours, mais si on dort dans le parc deux nuits, il faut payer un seul jour. Il faut aussi s’enregistrer comme campeurs près des gardes-parc.
Ceux-ci sont beaucoup plus avenants, nous donnent des détails sur les 4 emplacements possibles pour camper. Ils nous expliquent que comme le feu est interdit dans le parc, nous n’aurons pas d’Argentins qui feront des asados jusqu’à tard dans la nuit. L’après-midi, pour profiter du maté, certainement, mais nous serons au calme ce soir.
Comme c’est grand soleil, nous décidons de faire la plus grande promenade aujourd’hui, le sentier côtier. 8km le long du canal de Beagle, ils annoncent 4h de marche. Ça commence au bureau de poste le plus au sud du monde. Gros coup de marketing, tout le monde veut envoyer une carte avec le cachet de cette poste.
Sendero Costero
4h15
8 kms
Nous entamons la randonnée, c’est magnifique, de l’autre côté de la mer on voit d’autres montagnes, sur les îles au sud (en majorité chiliennes). L’eau est transparente, on a envie de se baigner. Le chemin est plutôt simple, dans une jolie forêt, avec des passages dans des criques splendides.
On s’arrête dans l’une d’elles pour manger, mais on se fait assaillir par des moustiques plutôt costauds, et ils sont nombreux. Pas moyen pour les filles et pour moi, on remballe et on va trouver un peu plus loin une avancée rocheuse dans le canal, loin des arbres et avec le vent marin, on n’est plus embêtés.
On continue la balade, les filles veulent s’arrêter prendre des photos tout le temps, ça nous énerve un peu car elles ne sont pas rapides. Mais une fois qu’elles se calment au niveau paparazzi, elles marchent bien sans râler. Avant d’atteindre la moitié, je fais demi-tour pour amener Coquillette à l’arrivée. Ensuite je prends le sentier dans l’autre sens pour rejoindre les Blondinettes.
Elles sont plus proches que je ne le pensais, elles ont bien avancé, c’est chouette. C’est de bon augure pour les randos dans les Andes ! Le trajet sera fait en moins de 4h finalement, si on retire le temps de pique-nique. On se pose ensuite dans une des zones de campement, une petite aire pleine de bosses, difficile de trouver un emplacement plus ou moins plat. Mais le cadre est magique, le long d’une jolie rivière, entouré de montagnes enneigées.
C’est l’heure du goûter, ensuite les filles regardent une émission ultra intéressante sur les manchots. On prend une bonne douche bien chaude, il y en a besoin ce soir ! Ensuite pizzas et au lit. Louis et Delphine débarquent à l’heure du coucher, je sors discuter un peu avec eux le temps que les filles s’endorment. Ils commencent un barbecue avec deux allemands qu’ils ont rencontrés la veille dans un bar, je n’ai plus ce rythme de vie, je rentre dormir. Il faut être en forme demain, nous allons au bout de la route 3 !